Cet énoncé nous rappelle qu’en dépit des victoires accumulées au fil des décennies, l’égalité des genres n’a jamais été réellement atteinte. On veut nous faire croire le contraire, mais, au fond, on ne cherche qu’à nous faire taire. Au fil des décennies, les femmes ont su démontrer qu’une fois unies, leur capacité à ébranler ce système si bien ancré est bien réelle. Nous avons su montrer qu’ensemble, nous pouvions déplacer des montagnes.
Aujourd’hui plus que jamais, nous sommes victimes de cette force dont nous avons su faire preuve. Propulsés par la peur, ils sont prêts à tout pour nous arrêter.
Partout dans le monde, nous assistons à une montée des extrêmes. La menace qui plane sur les droits des femmes semble découlée d’une mouvance socio-politique. Ces derniers temps, on ne voit que Donald Trump. Mais, cet extrémiste de droite, élu à la tête de l’un des pays le plus influent du monde, si ce n’est pas le pays le plus influent au monde, ne représente que la partie émergente de l’iceberg. La vérité, c’est que, s’il est là, c’est parce que d’autres personnalités toutes aussi puissantes et influentes, voire plus influentes l’ont porté là où il est. Pensons aux géants de la technologie par exemple.
Nous avons appris, en même temps que plusieurs autres, que la journée internationale des droits des femmes a été retirée des événements des calendriers de Google et d’Apple en catimini. Alors que, pour Apple, le retrait s’est fait « sans bruit, sans communiqué de presse. Juste une suppression lâche » pour reprendre les mots de la journaliste américaine Liz Plank datant du 6 mars, Google a, pour sa part, publier une communication sur son site web. On y explique que le retrait de cette journée de leur calendrier daterait de l’an dernier, réfutant ainsi l’idée que ce retrait soit lié à l’investiture de Donald Trump.
Toutefois, si ce retrait n’y est pas relié, l’investiture du 47e président des États-Unis aura quand même provoqué un recul chez Google en matière d’équité, diversité et inclusion (EDI). En effet, selon un article datant du 12 février du New York Times, au début février, « Google a supprimé ses objectifs spécifiant le degré de diversité qu’il souhaité pour sa main-d’œuvre, en expliquant qu’en tant qu’entrepreneur fédéral, elle devait se conformer aux décrets du président Trump s’opposant aux politiques de diversité, d’équité et d’inclusion. [Traduction libre]. »
Or, avec la multiplication des atteintes faites aux femmes, aux personnes trans, aux personnes migrantes et aux droits humains en général, ce retrait est d’autant plus parlant et inacceptable. Invisibiliser la journée internationale des droits des femmes, c’est invisibiliser le fait que nous avons dû nous battre pour acquérir des droits. Google et Apple sont utilisés par des centaines de millions de personnes sur la planète et ce petit rappel annuel ne faisait de tort à personne.
Nous pouvons encore renverser la tendance. L’histoire nous l’a montré, ensemble, nous pouvons accomplir de grandes choses ! Encore faut-il toutes marcher dans le même sens… En effet, le mouvement féministe lui-même est fractionné, une réalité qui l’affaibli considérablement. La vérité, c’est que le mouvement lui-même n’est pas épargné par cette montée de la droite.
En effet, les premières vagues du féminisme ayant pris forme en Occident, il va de soi que le cadre épistémique dans lequel s’inscrivent les théories féministes soit teinté des valeurs occidentales qui elles, tendent à droite. De fait, ses racines occidentalocentristes, prédispose le mouvement à adopter certaines pensées de droites, consciemment ou non. À partir des années 1980, soit à la fin de la deuxième vague du féminisme se développe une démarche critique dénonçant cet occidentalocentrisme de la pensée féministe. On dénonce un féminisme trop blanc et bourgeois, voire colonialiste.
La troisième vague se caractérise par l’omniprésence des théories de l’intersectionnalité dans le discours féministe. Ce changement de paradigme découle du regard critique de l’inattention à l’égard de la diversité entre les femmes dans les vagues précédente. Pourtant, l’analyse de l’oppression fondée sur le handicap brille par son absence dans les théories et les recherches féministes (Masson, 2013, p. 111) comme l’illustre la citation ci-dessous.
« La critique majeure que nous adressions à la deuxième vague féministe, c’est son inattention aux différences de race, de culture, de sexualité, d’appartenance nationale. […] La leçon la plus significative que nous avons apprise de ce faux pas du féminisme de la deuxième vague, c’est que le mouvement féministe ne peut triompher s’il ne remet pas en cause les structures de pouvoir de la richesse et de la race. (Labaton, Martin 2004, p. XXII-XXIV). »
L’invisibilité des femmes en situation de handicap au sein du discours féministe pourrait s’expliquer par notre difficulté à répondre aux valeurs de droites, les valeurs entourant la productivité entre autres. En tant que femmes en situation de handicap, la montée de la droite nous affecte directement, et ce, sur plusieurs plans. Pensons, notamment, à l’accès aux services considérant que les gouvernements de droites sont plus enclins à réduire l’implication de l’État dans les services publics, comme nous l’avons vu récemment ici. Considérant que les FSH risquent davantage de vivre de la précarité financière, nous pouvons facilement imaginer les répercussions de telles coupures. À vrai dire, nous en sentons déjà les conséquences avec l’arrivée de Santé Québec, entre autres choses.
En ce 8 mars, nous en appelons à l’unissons. Souvenons-nous d’où on vient. Souvenons-nous de pourquoi nous avons tant lutté, de pourquoi… ou contre quoi nous luttons. Souvenons-nous d’où on vient et, par-dessus tout, souvenons-nous d’où nous voulons aller ! Uni, le mouvement féministe est un beau mouvement, un grand mouvement, un mouvement innovant et porteur de valeurs visant une meilleure justice sociale, visant l’équité pour TOUTES ET TOUS.

Crédit image promotionnel & inspiration pour l’image d’AFH en haut :
Collectif 8 mars. Visuel : Chloé Biocca. Agence : MOLOTOV.